Le passe-partout
de Masako Togawa
(traduit du japonais par Sophie Rèfle – février 2023 aux éditions Denoël dans la collection Sueurs Froides- 172 pages)

En 1951 à Tokyo, une femme se fait renverser par une camionnette qui a glissé à cause de la neige. Elle décèdera rapidement mais la victime s’avérera être un homme finalement, bien que ce soit le premier avril, ce n’est pas Shigatsu Baka (poisson d’avril).
Le petit garçon de quatre ans du Commandant D. Craft. et de sa femme Kawauchi Ayako est enlevé. Les ravisseurs leur demandent de ne pas avertir la police. Ils verseront un premier paiement en attendant la suite des consignes.
Pendant ce temps-là, les deux concierges Tōtō Katsuko, Tamura Kaneko et les locataires féminines de la résidence K attendent un évènement majeur dans leur petite vie tranquille. En effet, leur bâtiment de cent cinquante logements de quatre étages va être totalement déplacé de quatre mètres pour l’installation de rails.
Puis un jour, le passe-partout disparait et réapparait à sa guise. Il cherche et trouve. Quelqu’un de vil s’amuse et laisse la possibilité à chacune de découvrir les secrets enfouis des unes et des autres jusqu’à l’effleurement de leur sombre nature humaine.

Masako Togawa (1931-2016) est l’une des plus importantes autrices de romans noirs japonais. Née à Tokyo, chanteuse, actrice et tenancière de boîte de nuit pendant des années, elle est connue pour ses romans policiers (Le baiser de feu, 1991) mais aussi en tant qu’icône gay et féministe.
Le passe-partout est un roman inédit en France. En parfaite militante de la cause féminine, Masako Togawa a choisi de nous parler d’un sujet sociétal sensible et sérieux au Japon et dont le pays se passerait bien. En effet, le nombre de femmes célibataires, veuves, divorcées ou maman solo est conséquent. Alliant la sécurité et l’occupation des logements disponibles, l’état a eu l’idée de regrouper ses femmes dans des résidences personnalisées et réglementées. Notamment les consignes de ne recevoir aucun homme ou de remplir un registre en cas de visite.
Certes, ses lieux de vies ont un avantage lié à la sécurité mais ils renferment également des destins de femmes qui s’entrecroisent, s’entremêlent ou s’entrechoquent. Tout autant de personnalités différentes et leurs fragments de vie Ce sont souvent des personnages à fleur de peau tout en retenue, au sein d’une vie insipide, plate, où la moindre petite chose prend un intérêt phénoménal, où elles vivent dans le passé et le poids brûlant de leurs souvenirs. Elles restent quand même des proies plus ou moins faciles à atteindre.
L’auteure évoque la ville de Sakaï, il est toujours agréable lorsque l’on connait une ville de la retrouver dans un livre surtout lorsqu’elle est loin et que l’on n’a pas la possibilité d’y retourner facilement.
Le Passe-partout, une découverte très plaisante, une écriture nuancée tout en finesse. Un roman noir, une triste représentation de la condition féminine dans une société japonaise où la normalité se doit d’être exemplaire à n’importe quel prix.
(Merci à Théophile des éditons Denoël)

4ème de couverture
La résidence K, édifice de briques rouges abritant des femmes célibataires, apparaît aux habitants de Tokyo comme une demeure tranquille pour dames respectables.
Lorsque le passe-partout qui permet de pénétrer dans les cent cinquante chambres de I’immeuble disparaît de la loge de la gardienne, les locataires retiennent Ieur souffle. Car la clé n’ouvre pas seulement les portes, mais donne aussi accès aux secrets les plus intimes des résidentes. Certaines femmes ont tout intérêt à brouiller les pistes.
Publié en 1962 au Japon, Le Passe-Partout est un grand classique du roman noir. Une pépite pleine de tension délicieusement tokyoïte.
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